Date : | 19/05/2016 |
Difficulté : | Difficile |
Accompagnateur : | B. Bernard |
Coordonnées UTM : | |
Participants : | 25 | Départ : | 31T 0691196 4868123 |
Longueur : | 16,9 km | Pique Nique : | |
Dénivelée : | 1030 m | Difficulté IBP index : | 93 |
Carte IGN TOP 25 n° : | 3038 & 3039 ET |
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Position par rapport à Buis-les-Baronnies : | 70 km S |
Commentaires techniques :
Départ du parking de la piscine, (31T 0691196 4868123), prendre plein Nord dans le village, circuit balisé vert N° 5, circuit des Aygiers, passer sur le barrage au dessus du village, continuer azimut N. Passer devant les aygiers Besson, toujours sur le circuit N° 5, après 6,5 km environ, changer de cap, prendre azimut E. ; piste « Les Lays » pour arriver au point (31T 0693811 4873758), vous êtes sur le GR 9, le suivre, passer dans le village ruiné de Travignon, toujours avec le circuit N° 5, abandonner le GR 9 au point (31T 0693358 4870367), panneau indicateur « Combe puits de Geay », retrouver la piste bitumée qui vous ramène au point de départ.
C. Malbois
Compte-rendu :
Le temps est bien maussade ce matin, à ne pas mettre un Randouvèzien dehors... J’en soupçonne quelques uns d’avoir prié en cachette pour que la pluie ne soit encore plus abondante afin de profiter de la douce tiédeur de leur couette (en duvet de canard, sûrement) !!! Mais non, ils seront néanmoins nombreux, Drômois et Vauclusiens, à affronter ce temps (de canard évidemment) pour rejoindre le point de départ à Saint-Saturnin d’Apt... Pour les fans de Saturnin (mais oui, souvenez-vous de ce canard qui enchanta nos jeudis !), c’était bien la moindre des choses que de rendre hommage à ce fantasque palmipède en pareille journée. En tout cas, pour ceux qui empruntent le Col de Fontaube et la Vallée du Toulourenc, à Brantes, il pleut... A Savoillans, il pleut... A Montbrun les Bains, bien sûr, ça baigne ... A Aurel, les gouttes se font plus espacées... Et à Sault, il ne pleut plus !!! Au risque de me répéter (voir randonnée du 24 Mars 2016), je m’interroge toujours quant à l’honnêteté de celui qui inventa l’expression « il pleut à Sault »... Ses observations météorologiques sont, à tout le moins, imprécises, fantaisistes voire quasiment diffamatoires !
Poursuivant notre route vers Saint-Saturnin, le ciel bleu réapparaît progressivement et c’est un beau soleil matinal qui nous accueille sur la placette près du monument aux morts. Ne voyez là aucun mauvais présage et, je vous rassure, la journée sera splendide et sans péripétie désagréable : fin du suspens ! Alors, passons aux choses sérieuses, c’est une évidence car c’est Bernadette qui est aux commandes aujourd’hui : il est bien connu qu’elle ne laisse rien au hasard (fin définitive du suspens). Et nous partons à l’assaut de la première pente, sans faiblir... Qu’y-a-t-il donc pour justifier un tel départ ? Ce beau moulin à vent qui domine la cité ? Nous sommes en Provence et l’ombre de Daudet plane toujours sur ce territoire. Ou bien est-ce celle d’un Don Quichotte qui aurait troqué sa pique pour des bâtons de marche ? Ce moulin est le dernier des quatre moulins, datant du XVIIème siècle, qui subsiste encore, en relativement bon état, et témoigne d’une agriculture autrefois vouée essentiellement aux céréales.
Un coup de sifflet autoritaire rappelle au groupe que le périple ne fait que commencer, il faut aller de l’avant. Sur les plaques de rochers qui rappellent que nous sommes ici sur la grande dalle calcaire des Monts du Vaucluse, le sentier dominant Saint-Saturnin, au milieu d’une végétation typiquement méditerranéenne, va nous amener bientôt à notre deuxième halte : après quelques mètres de descente, apparaît le barrage construit en 1763, consolidé au XIXème siècle et terminé en 1902, pour retenir les eaux des versants de la Combe du Château et alimenter les nombreuses fontaines et lavoirs du village. Bernadette en rappelle l’historique. Traversons l’ouvrage... Ouf ! Cela s’est bien passé !... Après avoir franchi la petite porte qui mène au château, poursuivons vers la chapelle par une allée caillouteuse bordée de valérianes et autres plantes affectionnant les vieilles pierres. En perspective, le Christ sur sa croix semble nous guider vers cette haute bâtisse accolée au donjon... Ou bien vers les Cieux ? Le méritons-nous ? Plus prosaïquement, abaissons le regard vers le village pour découvrir les anciennes enceintes (des XIIIème, XIVème et XVIème siècles) du château, dominant la Vallée du Calavon... Puis le clocher de l’Eglise... Les collines du Luberon... Les ocres de Roussillon bien visibles formant cette tache de couleur au loin.
Pour rejoindre le sentier qui nous mènera aux ayguiers qui sont le but principal de notre sortie, il faut contourner l’édifice, en passant sous une belle voute de pierre. Là, le donjon se présente sous sa face la plus monumentale, immense et majestueuse muraille, abrupte, percée de quelques rares ouvertures : impressionnant ouvrage dont l’austérité souligne la puissance... Fin de la visite des ruines de la citadelle médiévale, début de la promenade dans cette garrigue où les effluves de thym embaument l’atmosphère. D’aucuns saisiront l’occasion pour en récolter quelques poignées odorantes afin de concocter de délicieuses recettes d’antan. La large piste des Lays nous emmène vers Les Gavagnols, longeant le Ravin du Château, puis, une fois passé le Domaine des Roumanes, découvrons les ayguiers Bessons : les deux ouvrages, à ciel ouvert, de part et d’autre de la piste, sont de belle dimension. Celui de droite a la particularité d’être séparé en deux bassins par une arche de pierre (en provençal, « besson » signifie « jumeau »). C’est le début d’une série remarquable : ces ayguiers, ont été construits par les hommes pour récupérer les eaux de ruissellement dans une région où la ressource est rare. En effet, le sous-sol creusé de nombreuses failles ou avens ne retient pas cette eau si précieuse qui ne réapparaît qu’à la résurgence de Fontaine de Vaucluse, après un long parcours souterrain empreint de beaucoup de mystère.
Bernadette ayant prévu une pause-déjeuner à l’ayguier Besson de Baralier, c’est là que se fera le prochain arrêt : mais, « Ô rage, Ô désespoir », les lieux sont déjà squattés par un groupe de randonneurs qui n’en est qu’à l’apéritif. La désolation se lit sur les visages, les entrailles se manifestent... Et si nous expulsions ces concurrents déloyaux ? La courtoisie habituelle des Randouvèziens l’emportera et, visite faite, nous irons poser nos sacs un peu plus loin. Il n’empêche, remarquons la conservation (après restauration ?) de cet ayguier couvert dont les deux coupoles pourraient évoquer le buste avantageux d’une Sophia Loren ou... Non, nous n’irons pas plus loin dans des comparaisons hasardeuses. Le pique-nique terminé, alors que le ciel se charge un peu, reprenons notre itinéraire en direction de La Cassette. A quelques centaines de mètres, près d’un espace découvert, une grande cabane de pierre sèche montre un autre exemple de ces constructions caractéristiques de la région. Appelées plus couramment « bories », terme qui désignait à l’origine un domaine agricole, ce mot s’est répandu dans le langage touristique actuel pour nommer ces abris qui servaient d’habitat, de grange ou d’écurie sur les terres éloignées de la ferme.
Nous en rencontrerons quelques autres encore, notamment la borie de La Cassette, de facture diverse, en plus ou moins bon état, témoignages du savoir-faire des hommes pour construire ces édifices rustiques dont la toiture étonne toujours par l’ingéniosité de l’assemblage des pierres. Au passage, remarquons ce rocher au profil simiesque, œuvre d’art naturelle, ayant un air de famille avec le monstrueux King-Kong. Ayant rejoint le GR9, nous pourrons suivre cet itinéraire jusqu’à rejoindre, par un sentier qui descend en sous-bois, l’ancien village de Travignon où deux autres ayguiers particulièrement bien conservés feront l’objet de notre curiosité. L’ouvrage astucieux, qui alimentait le village, est complet : l’un des deux ayguiers fut restauré il y a quelques années par un chantier de jeunes. Quant au village lui-même, désormais abandonné depuis la Première Guerre Mondiale, nous en traverserons les ruelles étroites en essayant d’imaginer qu’il y eut une vie dans ces habitations écroulées où l’on retrouve encore le four à pain, éteint à jamais.
Dans la Combe de Travignon, nous laisserons le GR9 après être passés au Rocher de la Cadière afin de remonter vers Romanet et Masselle... C’est le retour vers Saint-Saturnin par une grande avenue bordée de riches et grandes maisons dont les murets en pierre sont en harmonie avec le territoire. Il est clair que cette commune est un lieu de résidence privilégié et très prisé. Le développement de la commune l’atteste. L’arrivée dans la rue principale ne manque pas de charme, les beaux immeubles dont les portes sculptées brillent d’encaustique témoignent eux aussi de la richesse passée de Saint-Saturnin dans cette vallée agricole privilégiée. Ou peut-être s’agit-il du commerce de la truffe car Saint-Saturnin est la patrie de Joseph Talon, le « père de la trufficulture moderne » dit-on, à qui l’on attribue le dicton « si vous voulez récolter des truffes, semez des "glands" ! Ne voyez-là aucun lien avec notre Achille Talon national (Erreur, dirait Francis, le père de ce personnage, le dessinateur Greg, était Belge !... Et je lui réponds que Greg fut naturalisé Français) dont les connaissances étaient pourtant sans limites... Quoique ! Achille Talon n’était-il pas suivi de son inséparable compagnon, le canard Pétard... J’y verrais bien un lien de parenté avec Saturnin ? La boucle est bouclée.
Nous remercierons chaleureusement Bernadette de sa conduite irréprochable (comme d’habitude) pour une randonnée culturelle riche et sans fausse note (il est vrai que nous n’avons pas chanté aujourd’hui) et, une fois n’est pas coutume, je dédie ce modeste compte-rendu aux quelques rares lectrices qui ont encore la patience de me lire et qui se reconnaîtront peut-être.
Gérard Langlois.